Lilou Echeverria, président de la Fédération Française: Pelote, pelote, et pelote
Lilou Echeverria ! Son nom, rien que son nom contient une histoire. Celle de ses grands parents arrivés d’Espagne, comme tant d’autres, réfugiés qui amènent ce patronyme sans « t » et avec un « a » final. Chez nous il y a les mêmes mais c’est plutôt Etcheverry. Celle de Milou, sa nounou, qui le garde enfant, et qu’elle appelle « Lilou », un prénom qui le suit encore aujourd’hui et qui n’a pas de fête calendaire. On ne lui souhaite qu’une fois sa fête à Lilou, c’est le mari d’une amie de Maïalene, la fidèle épouse depuis 1978, qui l’appelle. Il s’appelle Paul et se souvient que Pierre et Paul vont souvent ensemble, alors le 29 juin, il téléphone à Lilou, enfin à Pierre Echeverria.
La SNCF plutôt que l’INSEP
Son nom n’est pas la seule longue et belle histoire de Lilou Echeverria. Sa vie entière, faite désormais de 71 printemps est en fait une histoire, une seule et même histoire. Un fil rouge, contenu dans ce seul mot: pelote! Pardon, deux mots: pelote et passion. On parle là bien entendu au-delà du cercle familial, de Maïalene, Ximun et Mathilde, que l’on sait sacré.
A la pelote il n’a fait qu’une seule infidélité, elle est d’ordre professionnel. Il est sur le point d’intégrer l’INSEP où il a été admis pour préparer le 3ème degré du brevet d’État, oui mais il est aussi l’un des dix candidats reçus, sur le plan national, au concours des cadres de la SNCF, branche contrôleur de gestion. Il aurait pu, qui sait être DTN, il se contentera des deux premiers degrés du brevet d’État obtenu au Creps de Bordeaux.
Un président au long cours
La carte de visite de cet homme habité par cette petite balle nommée pelote reste un modèle du genre, 24 ans de présidence du BAC, le Biarritz Athletic Club, 12 ans de présidence à la Fédération Française de pelote basque, 12 qui seront 16 en 2028 puisqu’il vient d’être réélu pour un quatrième mandat. Aux forceps dira son opposition, au terme d’une phénoménale remontada répondra son camp. La vérité c’est qu’être élu quand le comité de Côte Basque est contre vous relève du tour de force en matière de pelote...basque !
La longévité de ces deux mandats dit à elle seule, sans besoin d’ajout, toute la qualité du dirigeant.
D’autant qu’il n’a rien demandé Lilou Echeverria. D’autant qu’il n’avait pas la bosse du dirigeant quant à 41 ans il raccrocha le gant du joueur et de l’entraîneur. Sauf qu’il fallait rendre service au BAC quand il cherchait un trésorier, c’est monnaie courante dans les clubs que cette quête de dirigeants. Lilou accepta de « compter », lui qui s’occupait déjà des jeunes. Il dut le faire remarquablement puisque le BAC le vit très bien enfiler le costume de président, un an plus tard, à la vacance du poste annoncé.
Non, non, il n’ a rien oublié
Et ainsi, de fil en aiguille, de bonne gestion en bonne gestion, de droiture en droiture, d’engagement en engagement, de « je dis, je fais en je dis je fais », il dessina lui même son destin et lui colla de si près à la peau qu’il le maintient, aujourd’hui encore en prise directe avec la compétition. Ah la compétition ! Ne branchez jamais Lilou Echeverria si vous avez seulement le temps de prendre un café avec lui. Il est encore une machine à remonter le temps, à remonter l’évènement, à remonter le score! Le mondial de Biarritz en 1978, le premier ? C’était hier monsieur ! La demi-finale de punta contre le Mexique? Mais oui, bien sûr, « nous menions de 11 points, 28-17, monsieur ! L’adversaire était le Mexique avec un arrière qui allait devenir un monstre au niveau mondial. « Nous les avions battus en poule, nous menions encore 35-34 et on perd 37-40, je l’ai encore là » Là c’est en travers de la gorge...Intarissable, il est intarissable Lilou Echeverria. La compétition inonde son corps, son esprit, elle l’envahit et elle le fait fragile, lui l’homme des responsabilités majeures, des décisions, des projets, des réunions à haute intensité. Biarritz 2022, le mondial plus proche de nous que l’autre, Jean Olharan et David Minvielle perdent d’un point en demi-finale contre l’Espagne. Le président de la Fédération Française n’est pas allé réconforter les deux hommes effondrés, non, il était encore plus malheureux qu’eux.
Très grand champion aussi
La compétition. Elle l’a couronné aussi, hissé sur les sommets. Avant d’être grand entraîneur, grand dirigeant, Lilou Echeverria fut un grand joueur de cesta punta. Deux titres mondiaux, en 82 au Mexique et en 1986 en Espagne, les deux avec Jean Paul Inchauspé, le patron de la banque éponyme, comme arrière, cinq titres de champion d’Europe en font foi...
Ce biarrot là est donc né pour faire les choses en grand, l’ordinaire n’a pas été son pain quotidien. Il est vrai, CV à l’appui, qu’il avait le don de bonifier tout ce à quoi il s’attaquait. L’une des seules fois où il dut renoncer, ce fut à la pratique de la main nue, celle de son père, celle de ses toutes premières pelotes. A 13 ans, les mains fragilisées par cet art si beau mais aussi douloureux et ingrat, il renonça et mit ses menottes au fond d’un gant d’osier. La suite s’écrit souvent en lettres d’or.
L’entraînement son « dada »
Donc, dans le prolongement du champion, tout naturellement ou presque succéda l’entraîneur. Il avait 39 ans. Ce costume là était taillé sur mesure, entendez qu’il lui allait comme un gant, mieux encore que tous les autres, tant l’entraînement était son « dada », tant il était gourmand des méthodes, friand des solutions. Le CREPS de Bordeaux, l’examen réussi pour l’INSEP le labo des champions, tout convergeait vers le but suprême jusqu’à ce que la SNCF le mette sur d’autres rails. Il obtint quand même ses lettres de noblesse dans ce domaine aussi. En 1994, il conduit l’équipe de France jusqu’en demi-finale du mondial de St Jean de Luz. Jean Marc Olharan était de la sélection battue d’un point par le Mexique. 35-34 et Lilou Echeverria s’en rappelle aussi bien que de l’autre, celle de 1978 alors il la raconte parce qu’il la voit comme si c’était hier, même pas, comme si c’était maintenant. Et il vous y transporte avec lui cet homme qui n’est pas seulement passionné, mais plus sûrement habité par la pelote, à moins que ce ne soit autre chose encore. Après tout, quand on possède un prénom qui n’en est pas un, on pourrait bien inventer un superlatif collant mieux que les autres à cet amour immodéré...
Gérard Bouscarel
A suivre
II- Le président à la question