Nicolas Echeverria De courts en canchas, il court
Si pour une raison quelconque, mais très certainement en relation avec le sport, vous cherchiez à joindre Nicolas Echeverria, le récent champion du Béarn pelote gomme pleine en mur à gauche, en compagnie de Benoît Bordenave, on vous conseille une tournée non pas des grands ducs, mais plutôt des canchas et des courts, des courts et des canchas. Vous pourriez le trouver à Pardies, là où il donne des cours de pelote en alternance avec Kevin Pucheux, à moins qu’il ne soit à Laroin, où il entraîne, à la pelote encore, toutes les catégories d’âge. Mais il peut tout aussi bien être à Mazerolles sauf que là c’est la petite balle jaune et la raquette au grand tamis qu’il aurait en main pour professer, et vous boucleriez la boucle en revenant par Lons, ici il joue, au tennis, dans l’équipe de pré-nationale dont l’ambition avouée est d’être la première du Béarn à monter au niveau national.
Stakhanoviste du sport
Bon, on vous le concède il est peut-être plus simple de lui laisser un SMS sur le portable, mais les délais de rappel ne sont pas garantis non plus car pour être le bon joueur de pelote qu’il est devenu, il fréquente aussi trinquet et mur à gauche avec son pote Benoît Bordenave et ces créneaux là c’est « entre midi et deux, à l’heure du déjeuner. »
Nicolas Echeverria est vous l’aurez deviné un « stakhanoviste » du sport. Un garçon à la vie trépidante, toujours sur la brèche, souvent pressé entre deux activités. Ce n’est pas monsieur 100.000 volts mais ça ressemble à la petite boule de nerfs. Sauf que Nicolas Echeverria aussi surbooké soit-il, vous le trouverez toujours avec la « banane » accrochée au visage, et vous aurez droit à un gentil bonjour, une poignée de main engageante, bref un sourire en bandoulière. Voyez, on considère que vos recherches de notre homme de 26 ans très bientôt et quelques faux airs d’hidalgo andalou ont été couronnées de succès...
Echeverria oui mais béarnais
Nicolas Echeverria n’a rien d’un hidalgo, ni d’un basque d’ailleurs malgré son nom « sans T » qui signifie la même chose (maison neuve) qu’Etcheverria avec un « T » . Il n’est pas non plus un « faux basque » comme le lui servaient les copains pour rigoler. Non, il est béarnais de papa et de maman tous deux nés à Pau, tout comme lui et il ne se connaît guère qu’un papy dont la naissance à Dancharria, pourrait expliquer ce patronyme.
Sa fiche d’état civil ainsi cernée, ou presque, son parcours sportif n’est guère plus compliqué, il passe, vous le savez, par les seules cases de la pelote et du tennis. Et les deux font bon ménage dès que Nicolas, à 5 ans et demi, effectue ses premières gammes.
Mais si sa famille est bien estampillée pelote, avec un frère pratiquant, un grand-père puis une maman ayant présidé aux destinées du club de Buros, lui, c’est le tennis qui lui pose le premier, des étoiles dans les yeux.
La lessiveuse du haut niveau
Le petit Nicolas est, à Serres-Castet, doué assurément. Prometteur aussi. Alors il intègre le circuit des jeunes gens repérés pour leur facilité naturelle et prend place sur les tablettes du comité, de la ligue puis de la fédération. Mais il met une croix sur la pelote et dieu sait pourtant qu’il l’aime. Il l’oublie donc. Désormais, son menu c’est tennis, tennis et tennis. La grande lessiveuse du très haut niveau est infernale on le sait, impitoyable aussi . Elle l’embarque. « De 6 à 14 ans je n’ai joué qu’au tennis à raison de 12 heures par semaine dès mes 10 ans, j’ai changé d’établissement scolaire, j’ai eu des emplois du temps aménagés, des plannings de préparation, jai disputé les championnats de France, j’ai même fait des tournois à l’étranger.»
Oui mais, ce n’est pas encore assez pour intégrer tout en haut le cercle restreint des élus. Il est classé 1/6, il n’y a plus que trois niveaux au dessus, mais ça ne suffit pas pour en vivre. Nicolas Echeverria lâche prise. Son rêve d’être un jour un joueur professionnel s’éteint. Le ramasse-t-on en lambeaux le gamin, détruit ? Pas du tout, le garçon rebondit très vite. « Je n’avais qu’une hâte, c’était de jouer à la pelote, de retrouver les copains, de retrouver un peu de ma jeunesse aussi toutes ces choses dont j’avais été éloigné. En revanche ce fut plus dur pour mes parents, ils avaient beaucoup investi pour que je réussisse. »
« Jouer au tennis sur la cancha »
La pelote n’a bien évidemment rien de comparable avec le tennis, elle en est même loin, très loin, à des années lumières, mais elle n’a pas non plus les mêmes exigences. Elle ne lui interdit, par exemple, pas de jouer aussi au tennis, en même temps alors qu’il a souffert d’être interdit de pelote dans ses années tennis. Et s’ il dit avoir d’abord « joué au tennis sur la cancha », le garçon a des bases solides puisque sur le terrain les deux disciplines ont tout de même quelques points communs, ne serait-ce déjà que la raquette! Surtout Nicolas est compétiteur, un vrai de vrai. Si bien qu’il se familiarise vite et bien avec les particularités de la pelote à gomme pleine parce que c’est ce qui se joue à Buros. L’an dernier, il se qualifie pour la finale 2ème série du championnat de France, tête à tête, de baline en mur à gauche. Il y est balayé, n’existe pas, et prend une rouste. Oui mais, il avance six mois de pratique en tout et pour tout. Sa découverte de la spécialité elle vient de l’ entraînement d’un jeune à Laroin. « J‘ai pris un plaisir fou avec lui et du coup je me suis lancé » dit-il, insatiable. Du coup il va disputer cette année le championnat élite et s’il s’attend à souffrir il veillera « à ne pas se faire défoncer et puis à aller chercher le titre de Nationale « B », celui qui lui a échappé à Biarritz...
Elargir encore l’éventail
Professeur diplômé d’état en tennis, diplômé aussi de la fédération de pelote, Nicolas Echeverria entraîne, et enchaîne les séances jusque très tard toute la semaine. C’est son gagne pain, donc sa priorité naturelle, elle le contraint à ne se consacrer sur « sa » pelote que l’espace des week-end. C’est parfait pour disputer les championnats mais c’est tout, pas question de s’inscrire sur les tournois…, c’est déjà dur de trouver de quoi s’entraîner Alors s’il a le revers, le coup d’œil, la vitesse de déplacement, le lift, du tennisman qui le font très élégant sur la cancha, il a aussi un mental à soulever les montagnes.
Cet été, mi-aôut, avec Benoît Bordenave, le copain d’enfance retrouvé à Buros, ils décident de disputer avec ambition le championnat du Béarn de gomme pleine en mur à gauche. Ils se préparent en conséquence. Le résultat ? Le duo survole la compétition. Il mène ainsi, ce n’est qu’un exemple, 25-1 lors de la finale qui les couronne à Pardies. Nicolas Echeverria, fidèle à lui même, dirige les opérations, il oriente, encourage son pote, il commente aussi et l’affaire réglée, il annonce aussitôt en vouloir plus! Le titre national élite, rien que ça… Comme il veut également tâter de la paleta cuir, « c’est un challenge qui m’intéresse ». Il a aussi eu un contact avec Olivier Laberdesque, pour l’épauler à gomme pleine trinquet « mais c’était compliqué pour lui comme pour moi ».
Vrai pelotari
N’en fait-il pas trop Nicolas Echeverria qui depuis trois ans partage aussi sa vie avec la charmante Andréa ? N’en demande-t-il pas trop à ce corps sollicité parfois à trois reprises le même jour. Il affirme que non et dit trouver la juste mesure des choses entre les cours qu’il donne et la pratique sportive proprement dit. Et puis il libère une telle quantité d’énergie sur les canchas où il est de moins en moins le « joueur de tennis qui joue à la pelote » mais de plus en plus le vrai joueur de pelote, que le garçon n’a sans doute pas fini de surprendre. Pour le plus grand bonheur de la Section pour laquelle il joue depuis 5 ans et à laquelle il a apporté son deuxième titre de la saison. Pour le sien aussi ?
Bien sûr, Il ne se conçoit que dans le succès Nicolas Echeverria et peut-être même que dans chaque coup de pala qu’il délivre avec fougue et rage il existe encore une once de revanche sur l’autre raquette, celle qui a brisé un rêve... Il ne l’a pas dit, il était trop pressé d’aller ou à Pardies, ou à Laroin, ou à Mazerolles, ou à Lons... Puisque de courts en canchas il court, il court Nicolas.
Gérard Bouscarel
*Sur notre montage photo: la palette des activités de Nicolas Echeverria.