La baline, c'est son... Bijou
« C’est un instrument fabuleux. Le plaisir de frapper la pelote avec, est énorme. Le bruit de l’impact est génial. » Si on le laissait faire David Bijou poursuivrait sans doute longtemps non pas tant pour convaincre son auditoire que pour lui faire toucher du doigt combien il est heureux de manier cet instrument. Il parle du paleton avec la même passion, le même amour allions nous écrire, que celui d’un musicien avec son violon. Tenez, il les fabriquait lui même, cet éléctro-mécanicien en aéronautique chez Nay-Adour à Bénéjacq, lorsqu’il n’était pas si facile de se procurer le « Vasquito » et il faut bien reconnaître qu’à défaut de découper et d’assembler de véritable bijoux- oui, c’était facile - ses outils de bois supportaient fort bien la comparaison.
Paleton, le bois puis le carbone
Paleton, « Vasquito », il est grand temps qu’on éclaire la lanterne de tous ceux qui ne seraient pas totalement au fait du jargon propre à la « baline », cette spécialité de la pelote bénéficiant d’une coquette appellation. Cette appellation dont Raymond Cazadebat, notre Larousse à nous, donne une origine sans qu’elle soit d’une certitude absolue (lire plus bas).
Le paleton est donc la raquette des joueurs de baline. A la différence de la pala, il est moins épais, plus léger et fait d’un l’assemblage de lamelles de bois d’essence et de densité différentes. « Vasquito » c’est le nom du fabricant Argentin, le numéro 1, incontournable, à tel point qu’il avait accoler son nom à l’instrument lui même.
Avec l’arrivée du paleton en carbone, « Vasquito » a perdu de sa superbe et surtout le leadership du marché. Peu importe, l’époque ou David Bijou était tout heureux de bénéficier des contacts en Espagne de ses aînés, Eric Lou Poueyou, Jean Marc Olharan en tête, pour faire ses emplettes de pelote, est révolue. Aujourd’hui l’Argentine est à deux clics d’internet si besoin.
David Bijou au bonheur de la Section
Outre le paleton, la baline se joue avec une petite pelote de 40 grammes. Sous une épaisse couche de gomme elle est creuse, ce qui lui vaut d’être appelée aussi, plus académiquement « paleta gomme creuse ». Cette pelote c’est une bombe, elle est plus vive que toutes les autres et son rebond monte très haut.
Et vous l’aurez compris, elle fait le bonheur de David Bijou, cette pelote minuscule. Et l’homme fait, lui le bonheur de la Section paloise, qui tient là un référent des plus dévoués à une spécialité que pratique une vingtaine de licenciés, dont quelques féminines. Ce n’est pas énorme et David Bijou le sait, cette spécialité n’est pas en pointe, ni à la Section Paloise ni ailleurs, même si avec la fratrie des Pucheux, Lasseube fait exception à la règle et domine, avec une réelle marge de manœuvre, la compétition.
Donc, avec son paleton comme bâton de pèlerin, David Bijou, vante les qualités de cette discipline, la « moins traumatisante » pour les épaules ce qui lui permet d’être à 52 ans encore un plus qu’honnête joueur de seconde série.
Spécialité internationale
Ce n’est pas tout, elle est aussi internationale et chez les hommes et chez les féminines, or celles-ci, avant l’avènement tout récent de la cesta punta, ne possédaient au plus haut niveau que le frontenis et la baline…Quoi d’autre monsieur Bijou au crédit de cette discipline ? « Le toucher de la pelote, la technique est ici un atout qui peut t’aider à accrocher des joueurs plus forts que toi. Bien sûr c’est commun à beaucoup d’autres sports mais à la baline si tu es très appliqué avec le poignet tu poses la pelote où tu veux, et ça c’est génial... »
A son crédit, un parcours de pelotari quasi complet… Et une passion pour ce sport qui remonte à son enfance et aux les vacances familiales à Charre avec ces parties jusqu’à la tombée de la nuit sur le fronton du village. Puis la famille plutôt attirée par les versions cuir de la pelote, il s’y essaye jusqu’à ce que l’épaule lui dise stop.
Un jeu fantastique
C’est égal, il a le virus bien installé dans le corps et l’esprit alors c’est à gomme pleine mur à gauche qu’il poursuit jusqu’à ce que son activité professionnelle, de haute précision, le rapproche de Pau donc de la Section Paloise. Il y arrive alors qu’elle s’apprête à quitter le Stadium de la gare et il n’est déjà plus tout jeune, mais il a la possibilité de jouer aussi à la baline. C’est là qu’il rencontre Eric Loupoueyou autre fervent.
« J’ai croqué dedans, j’ai trouvé ce jeu fantastique » n’en jetez plus, c’est suffisant, David Bijou est « balinisé » pour de bon et si son plaisir est de jouer, toujours de jouer, il a aussi toutes les qualités pour encadrer et gérer le groupe des « vert et blanc.» Demandez à Raymond Cazadebat ce qu’il en pense lui qui s’échine à établir les programmes les plus précis, puis ensuite collecter tous les résultats que vous retrouvez dès le dimanche soir, il vous dira qu’il « faudrait un David Bijou pour chaque spécialité. » Un joli compliment pour récompenser celui qui n’a pas besoin de lumière pour faire vivre ses convictions. Ce David Bijou en est un et des plus précieux !
Le jardin des Argentins
Une curiosité en guise de préambule: Biarritz 1958, la baline en trinquet fait sa première apparition au championnat du monde, troisième édition ! Biarritz 2022, le paleton, la raquette révolutionnaire en fibre de carbone est autorisée pour jouer à Baline, c’est encore une première .
Ainsi Biarritz est-elle au cœur de l’histoire de cette spécialité qui est par ailleurs, la chasse gardée des argentins. On vous en fait la démonstration sans plus attendre: depuis Biarritz 1958, soit 16 éditions des championnats du monde, l’or est argentin, la baline est argentine! Elle ne l’est pas exclusivement en mur à gauche mais elle reste très ancrée Amérique du sud puisque Argentine et Mexique se partagent le titre suprême sans tolérer la moindre intrusion d’autrui. Les chiffres sont, naturellement les mêmes, reportés sur les championnats Panaméricains où depuis 1975, l’Argentine n’a laissé l’or au Mexique qu’une seule fois, à Lima en 2019
« Le jeu va plus vite, il est plus dynamique, plus aérien, il permet des effets » répondait Kevin Pucheux le lasseubois, chef de file de la discipline en France quand on lui demandait les qualités de cette raquette, faite de lamelles de bois différents et collées, plus large et plus fine que la pala traditionnelle en bois plein. Un organisateur de tournoi ajoutait : « il est fini le temps où les gradins se vidaient à l’entrée des joueurs de paleta gomme creuse, le spectacle est désormais au rendez-vous et apprécié. »
On la dit « argentine » oui, mais elle tirerait ses origines « del balin » espagnol -avec un accent aigu sur le « i », une balle de petit calibre redoutable de précision même à longue distance. Nous ne sommes sûrs de rien, sinon des précisions de l’ami Raymond Cazadebat, à savoir qu’on y jouait en France avant la guerre avec des pelotes de fabrication « Michelin » et que la gomme pleine n’est venue qu’après.
Gérard Bouscarel